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Au Lesotho, les contraceptifs injectables permettent aux femmes de décider de leur avenir
- 12 Mars 2020
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HA MOEKETSANE, Lesotho – Regina Mokoena a été témoin des conséquences de la sécheresse et du changement climatique sur la demande de planification familiale dans son village.
Mme Mokoena est agente de santé à Ha Moeketsane, dans le district de Mokhotlong du Lesotho, une région rurale et montagneuse. Elle explique que la sécheresse perturbe les activités dans cette communauté agricole, et qu'il devient difficile pour les parents de subvenir aux besoins des familles nombreuses.
« En ces temps difficiles, il n'est pas facile de chercher un travail ou de trouver un emploi lorsqu'on a beaucoup d'enfants, surtout ici au village », explique-t-elle. « De plus, l'éducation des enfants est aussi une tâche exigeante ».
L’été dernier, lors des récoltes, le district de Mokhotlong a été l'un des plus touchés par une grave sécheresse. Le bétail représente une importante source de revenu, et beaucoup d’animaux sont morts.
Mme Mokoena explique que l'incertitude économique a provoqué une demande de contraceptifs parmi les femmes du district, et notamment d’une nouvelle forme de contraception particulièrement bien adaptée aux zones rurales : des contraceptifs injectables que les femmes peuvent s’administrer elles-mêmes.
Au Lesotho, Mokhotlong affiche l'un des taux les plus élevés en besoins de planification familiale non satisfaits. Par conséquent, la région possède aussi le taux de fécondité le plus élevé du pays, avec une moyenne de 4,4 enfants par femme. L’écart entre la fécondité réelle et la fécondité souhaitée par les femmes est également le plus important du pays, selon un sondage récent effectué auprès des ménages. De plus, le taux de grossesse chez les adolescentes est le deuxième plus élevé du Lesotho, avec 24 % des filles âgées de 15 à 19 ans ayant déjà été enceintes.
Ces problèmes ne sont pas présents uniquement dans le district de Mokhotlong. Dans tout le pays, les avortements non médicalisés sont l'une des principales raisons de l'hospitalisation des femmes et des filles, selon un rapport annuel conjoint de 2019.
L’UNFPA travaille avec le gouvernement pour étendre l'accès à la contraception à toutes les femmes qui le désirent. La planification familiale volontaire réduit les grossesses non désirées, les grossesses chez les adolescentes, la mortalité maternelle et le recours à l'avortement.
L’introduction des contraceptifs injectables et auto-administrés aide à faire progresser cet effort en augmentant le nombre d'options disponibles pour les femmes.
L’UNFPA et le ministère de la santé forment des professionnels de santé comme Mme. Mokoena pour qu'elles puissent à leur tour apprendre aux femmes à s'injecter le contraceptif elles-mêmes. Mme Mokoena raconte qu’elle en a parlé ensuite à des rassemblements, et que la réaction du public a été largement positive.
Ce contraceptif auto-injectable est une option relativement nouvelle de planification familiale, mais est déjà très populaire. L’an dernier, l’UNFPA a distribué 13 millions d'unités de ce contraceptif et la demande reste supérieure à la disponibilité du produit.
Au niveau international, près de 40 000 sages-femmes et 48 000 agent·e·s de santé communautaires ont été formé·e·s par l’UNFPA à prescrire et distribuer ce type de contraception.
Pour de nombreuses femmes pourtant, l'idée de s’auto-administrer ces injections est effrayante, ce qui contrebalance parfois les avantages du produit.
« Je suis assez convaincue par ce nouveau contraceptif car il me permettra d'espacer les naissances », explique Thato*, qui vit à Mokhotlong. « Pour l'instant, j'ai quand même peur de me faire les injections. Mais j'imagine qu'il faudra que je surmonte ma peur pour éviter de devoir marcher plus d'une heure régulièrement pour aller à la clinique ».
Ce contraceptif auto-injectable permettrait aussi de réduire la stigmatisation, selon ‘Manthati Sekoati, infirmière en chef de la clinique de Mapholaneng dans la région de Mokhotlong. Les jeunes ont souvent honte d'être vu·e·s en train de se procurer des contraceptifs, remarque-t-elle, et les femmes sont souvent soumises à une forte pression sociale pour avoir une famille nombreuse. Si elles peuvent s’administrer elles-mêmes leur contraceptif chez elles, il est probable qu'elles soient plus libres de choisir le nombre et l'espacement de leurs enfants.
Mme Sekoati précise qu’il faut cependant se rendre au moins une fois à la clinique, pour apprendre comment faire l'injection.
– Violet Maraisane
* Le prénom a été changé pour préserver l’anonymat